Le Cercle de réflexion Propositions et Initiatives (CRPI) a organisé le 11 février à Pointe-Noire, une conférence internationale sur le processus démocratique en Afrique, animée par Ismaila Madior Fall, professeur agrégé de droit public et de sciences politiques à l'Université Cheikh-Anta-Diop de Dakar et directeur du Centre de recherche, de documentation et d'études sur les institutions et législations africaines (Credila)
Cette réflexion initiée par le CRPI se justifie au regard des objectifs de ce
cercle de réflexion, à savoir : réunir les intellectuels autour des grands
sujets d'actualité pour débattre et recueillir de judicieuses réflexions
profitables à tous. « Le cercle veut être un espace de réflexion soutenue
par une diversité dans la réflexion et la solidarité dans l'objectivité »,
a déclaré à l'ouverture de la conférence, Claude Abraham Milandou, coordonnateur
du CRPI.
Ambroise Bayakissa, deuxième coordonnateur adjoint du CRPI, a présenté
l'itinéraire de la conférence qui obéit selon lui à une logique bilancielle
vingt ans après l'expérimentation des principes véritablement démocratiques en
Afrique, au lendemain des conférences nationales souveraines qui ont donné lieu
à l'instauration d'un pluralisme politique dans la plupart des pays africains.
L'Afrique a-t-elle fait sienne les principes démocratiques ? Est-ce que les
chances de voir l'Afrique devenir véritablement indépendante à courte ou moyenne
échéance sont tout aussi certaines que ses perspectives de développement ?
Ces réflexions ont fait l'objet de
l'exposé du professeur Ismaila Madior Fall. Après avoir énoncé l'itinéraire de
l'installation des régimes démocratiques en Afrique avec les conférences
nationales et la conférence de La Baule, la démocratie s'est imposée en Afrique.
Ce pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple a eu ses spécificités en
Afrique tout en se fondant sur des constitutions ayant pour socle la séparation
des pouvoirs. « La démocratie n'est ni importable, ni exportable. Elle
s'adapte aux spécificités de chaque société. Autant de démocraties en autant de
pays. C'est pourquoi la démocratie américaine n'est nullement comparable à la
française encore moins à la britannique ou à l'allemande », a-t-il déclaré.
Vingt ans plus tard, le bilan dressé fait état de l'existence de deux tendances.
Les pessimistes disent que les malheurs post conférences nationales (guerres,
conflits armés,...) viennent de la démocratie tandis que les optimistes pensent
que des avancées ont été perceptibles pendant deux décennies en Afrique, à
l'instar de la refondation des institutions nationales et l'engagement d'un
nouveau type de contrat social.
Toutefois, le professeur Ismaila Madior Fall veut que l'on ne sous-estime pas
les insuffisances du système démocratique, avec les menaces culturelles que font
peser la misère du peuple. « La démocratie dans la misère entraîne la misère
de la démocratie », a-t-il avancé. La démocratie substantielle, avec le non
respect des droits humains et individuels sans oublier la faiblesse de la
culture démocratique, est aussi une menace. « Les pays africains doivent
faire l'effort dans la culture de l'alternance démocratique. Le dirigeant
africain doit savoir passer le témoin. Cela doit se faire ni trop tôt, ni trop
tard. C'est là qu'intervient le génie politique qui donne aux sociétés la chance
d'avoir des leaders facilitateurs à un certain moment de notre histoire. Léopold
Sedar Senghor dans les années 80, Nelson Mandela dans les années 90 ou Denis
Sassou N'Guesso en 1992, ont été des leaders facilitateurs », a-t-il
poursuivi.
Pour le professeur Ismaila Madior Fall, les Africains ont l'impérieux devoir,
pour appuyer le processus démocratique, de promouvoir la culture d'évaluation et
la mutualisation des expériences. « Il faut évaluer le niveau atteint par
les institutions démocratiques et impulser de vraies réformes attendues. Le
processus d'évaluation doit être local et endogène. Une véritable évaluation
privilégie la réaction et la perception des citoyens. On évalue la citoyenneté,
les lois, les droits, la société civile, la participation du peuple »,
a-t-il renchéri. L'autre domaine à promouvoir est la mutualisation des
expériences africaines. « Tous les pays sont dans le processus de
démocratisation mais les démocratisations ne sont pas au même niveau »,
a-t-il conclu.
Par Jrang An@go.
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