Le Pr Claude Maylin, cancérologue à l'hôpital
Saint-Louis à Paris, est conseiller médical du président de la République. Il
présente pour les lecteurs des Dépêches de Brazzaville le projet de
rénovation du système congolais de santé.
Depuis quinze ans, le Congo Brazzaville a entrepris progressivement, étape
par étape, des progrès dans de nombreux secteurs. La première étape a été de
rétablir la paix civile grâce à la détermination et à la sagesse des
responsables du pays.
La deuxième a été l'ouverture d'une politique de municipalisation des douze
départements pour bâtir les établissements institutionnels nécessaires au
fonctionnement de l'État. Parallèlement, une politique de grands travaux a été
mise en place : routes, aéroports, communications et électrification du pays,
avec notamment la construction du barrage hydraulique d'Imboulou et la centrale
thermique au gaz de Pointe-Noire ainsi que les réseaux électriques.
Cette électrification du pays est essentielle pour le développement de son
économie, pour l'amélioration des conditions sociales. Plus particulièrement,
l'électrification du pays et l'accès à l'eau courante devraient permettre
d'améliorer de manière efficace le fonctionnement des hôpitaux. La troisième étape a permis une amélioration très sensible de la situation
économique du pays grâce au règlement de la dette du Congo et à la stabilisation
haute du prix du pétrole.
Dès lors, des moyens financiers vont être investis dans le social et
notamment le secteur santé. 2012 est donc aujourd'hui l'année de la Santé. À ce
titre, un audit du système de santé, fait par le gouvernement, a permis de
cibler les points faibles et le niveau insuffisant dans le domaine de
l'information du public, de la prévention des fléaux, des soins et de son
financement. À partir de ce bilan, un programme ambitieux a été mis en place
pour les trois prochaines années. Sous l'égide du président de la République,
plusieurs ministères sont impliqués : Santé- population, Économie-finances,
Plan, Famille, Recherche et enseignement, Environnement et développement
durable, Humanitaire.
Sept objectifs ont été sélectionnés
Premier objectif : éradiquer la pauvreté et la faim
-L'incidence de la pauvreté est passée de 70 % en 1990 à 50 %
en 2010. En clair, un Congolais sur deux vit en dessous du seuil de pauvreté
fixé à 544 F CFA par personne adulte et par jour. La lutte contre cette pauvreté
est renforcée par une relance économique estimée à 4 % par an.
-La malnutrition touche plus particulièrement les populations des campagnes,
les enfants, les femmes enceintes et les personnes du 3e âge. C'est la raison
pour laquelle l'autosuffisance alimentaire visant à développer l'agriculture
dans les campagnes et les forêts, avec notamment des efforts pour l'élevage, la
pêche et les cultures diverses, constitue une priorité pour le gouvernement.
La lutte pour l'alphabétisation et la scolarisation s'est
améliorée, passant de 72 % en 2005 à 90 % en 1990. Le développement des écoles,
lycées et université pour une population jeune est un axe essentiel de
développement durable du pays.
Le ratio filles-garçons dans l'enseignement primaire est
passé de 0.90 en 1990 à 0.93 en 2008. Parallèlement, l'effectif des femmes dans
la fonction publique et dans la vie politique du pays s'est sensiblement
amélioré passant de 32 % en 2004 à 40 % en 2010.
La situation sanitaire des
enfants de moins de 5 ans au Congo est préoccupante. Le taux de mortalité est
passé de 100 décès pour 1 000 en 1990 à 112 décès en 2005.
L'accessibilité
aux soins, la qualité des soins et le support financier du gouvernement sont
essentiels dans ce domaine. Par exemple, le programme de vaccination rougeole -
poliomyélite est gratuit.
Parallèlement, le taux de mortalité maternel est
inquiétant. La lutte pour l'amélioration des soins obstétricaux : hémorragie,
infection, VIH, paludisme, tuberculose constitue également un souci et une
priorité pour le gouvernement.
Cinquième objectif : lutter contre le VIH /sida, le paludisme, le cancer et autres fléaux
Dans ce domaine, l'aide gouvernementale
ainsi que les aides internationales ont permis de s'attaquer à une situation
préoccupante.
La prévalence pour le sida était de 4,2 % en 2003, elle est de
3.2 en 2009 avec un objectif à 2 % en 2015. La lutte contre le sida est basée
sur la prévention avec l'éducation du public, la gratuité des préservatifs et la
gratuité des traitements antiviraux qu'il convient de réaliser pour tous sans
discrimination.
Le même combat a été mené pour lutter contre le paludisme. 60
% des motifs de consultation, au Congo, sont liés au paludisme. Là aussi la
lutte contre le paludisme repose sur les axes de prévention et d'éducation de la
population : règles d'hygiène, moustiquaires mais aussi gratuité des traitements
anti-paludéens.
La tuberculose est un problème majeur de santé public avec une prévalence
estimée à 449 pour 100 000 habitants avec 10 000 nouveaux cas par an. Là aussi
des mesures ont été prises : prévention avec vaccination par le BCG, éducation
du public et accès aux traitements anti-tuberculeux.
Ces trois fléaux ne
doivent pas faire oublier les autres risques fréquents de maladies. Là aussi, la
prévention, l'éducation du public et l'accès aux traitements sont une ambition
de santé publique dont on connaît les difficultés dans plusieurs domaines :
cancer, maladies cardio-vasculaires, diabète.
Sixième objectif : améliorer le statut des soignants.
C'est un fait connu de tous au Congo que les médecins,
infirmières, techniciens et administratifs ont des salaires inadéquats par
rapport aux responsabilités qu'ils exercent. C'est la raison pour laquelle le
salaire de ces fonctionnaires dans les hôpitaux publics a été augmenté de 50 %.
Un meilleur statut juridique et une amélioration des salaires devraient
permettre, d'une part, de stabiliser ces soignants dans les hôpitaux et, d'autre
part, de ramener dans le pays les médecins congolais travaillant en Europe,
notamment en France. Effectivement, aujourd'hui, le Congo manque cruellement de
médecins.
Des coopérations sont faites avec des médecins chinois, cubains et français.
À ce titre, au côté de la coopération Sud-Sud, des coopérations médicales entre
le Congo et la France doivent être renforcées.
Il existe un projet de
formation des personnels de santé géré par l'ambassade de France, l'Agence
française de développement et l'Assistance publique hôpitaux de Paris.
L'autofinancement par le gouvernement a bénéficié d'un budget
d'investissement sur trois ans de 92 221 milliards FCFA (soit 140 millions
d'euros). Ce budget supplémentaire a pour but d'améliorer le système sanitaire
congolais dans plusieurs domaines : amélioration de la gouvernance, amélioration
des standards et guide thérapeutique, amélioration de la couverture sanitaire,
réhabilitation et maintenance des équipements, planification de la gestion des
ressources humaines de la Santé, réduction de l'inégalité à l'accès aux soins,
amélioration de la qualité des prestations, gestion des médicaments et lutte
contre les faux médicaments, gestion des auxiliaires de santé, lutte contre les
fléaux, gestion des urgences et catastrophes.
Parallèlement à ce soutien gouvernemental, le Congo bénéficie d'une aide
publique internationale non négligeable. De plus, il est important que le Congo
améliore son système de retraite et surtout la Caisse nationale de sécurité
sociale qui ne couvre actuellement que 15 % de la population. Enfin, dans ce
cadre financier, la lutte contre la corruption demeure un objectif difficile
mais incontournable.
ConclusionPour les prochaines années, l'action du Congo -Brazzaville permet des espoirs d'amélioration dans de nombreux domaines et notamment dans le domaine de la Santé.
Ce programme Santé 2012, pour un plan à trois ans, doit être mené avec rigueur, transparence, détermination et optimisme.
Pr Claude Maylin
Par Jrang An@go.
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