samedi 4 mai 2013

Intégration : feux croisés sur la ministre Cécile Kyenge Kashetu

Photo : Cécile Kyenge Kashetu.

La première femme d'origine africaine à entrer dans un gouvernement en Italie fait l'objet d'attaques virulentes et de soutiens mous de la part de la classe politique

Nommée ministre de l'Intégration dans le gouvernement formé par Enrico Letta le 28 avril, l'Italo-Congolaise (RDC) Cécile Kyenge Kashetu, est prise en tenaille entre ceux qui déjà la haïssent pour ce qu'elle est et ceux, timides, qui prennent sa défense.

Dans le camp des premiers, on compte une poignée d'extrémistes politiques, mais aussi, sans doute, une majorité silencieuse pour qui l'intrusion d'une immigrée dérange fortement les coutumes jusqu'à présent en cours en Italie.Dans le deuxième groupe, on rencontre sans peine tous les Italiens d'origine africaine, les Italiens dits de la deuxième génération, souvent nés de parents étrangers vivant en Italie, mais peu organisés et sans porte-voix crédible. Et puis, il y a aussi les membres du Parti démocrate (PD), qui est la principale formation politique de l'échiquier national, auquel appartient de longue date Cécile Kyenge. C'est également au PD qu'appartient l'autre « phénomène » politique italien, Jean-Léonard Touadi, naguère premier député d'origine africaine (Congo-Brazzaville) au Parlement de la péninsule.

Et comme de juste, tous les deux se sont signalés par leur volonté déclarée de réformer la loi Bossi-Fini, qui règlemente actuellement les conditions d'accès à la nationalité en Italie. Tous les deux veulent privilégier le droit du sol à la loi du sang qui prévaut. Devrait être italienne, selon eux, toute personne née sur le sol italien et pas uniquement le citoyen dont les parents sont italiens d'origine. Rien d'étonnant donc à ce que fusent des rangs de la droite extrême les critiques les plus radicales, du racisme à l'état pur, surtout à l'encontre de la nouvelle ministre.

« Je pense que nous devons nous faire à l'idée qu'un jour un originaire d'Afrique soit président en Italie. » Ces propos viennent de la présidente de l'Assemblée nationale, Laura Boldrini, écœurée par les attaques contre Cécile Kyenge. De son côté, une autre Cécile, elle aussi originaire de Modène, Cecilia Guerra, souligne que « les phrases de Borghizio et Zaia [deux députés du parti xénophobe de la Ligue du Nord - NDLR] et les insultes sur les réseaux sociaux tout comme les écrits sur les murs sont très certainement des épisodes de racisme contre une personne d'origine africaine et à la peau noire. » Elle souligne également, comme pour en atténuer la gravité, que ces paroles « se doublent aussi d'une autre forme de racisme, la misogynie ».

Pour cette députée du PD, ces manifestations expriment la peur devant « la lucidité et la fermeté avec lesquelles [Cécile Kyenge Kashetu] a toujours posé sur la table les problèmes cruciaux, comme le droit à la citoyenneté des enfants nés en Italie, l'abrogation du délit de clandestinité, la fermeture des centres de regroupements forcés et l'abrogation du permis de séjour à point. Or c'est sur ces terrains que nous devons plus que jamais nous placer à ses côtés. » Cecilia Guerra ne donne pas trop à savoir si ses propos relèvent de l'incantation pure ou de la volonté politique. Car beaucoup, y compris dans les rangs de la gauche, craignent que Cécile Kyenge n'ait été choisie que par convenance.

Par Jrang An@go.

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