mardi 3 janvier 2012

Croissance économique : des effets encore peu profitables à la majorité de la population

Photo 1 : La route nationale n°1 sur le tronçon Dolisie/Pointe-Noire.      Photo 2 : Le barrage  hydroélectrique d'Imboulou.


La République du Congo affiche le taux de croissance le plus élevé de la sous-région d'Afrique centrale. Il est estimé à 6,3% contre une prévision moyenne de 5% en 2011 pour les pays d'Afrique subsaharienne

Cette performance, qui s'explique par le désendettement du pays aujourd'hui en situation de surliquidité, serait, selon les institutions de Bretton Woods, peu profitable au plus grand nombre des Congolais alors que les initiatives pour une meilleure redistribution des revenus se multiplient.

« Malgré de bonnes perspectives économiques, celles-ci ne profitent pas, dans la plupart des cas, à la majorité de la population », a fait observer le représentant du Fonds monétaire international (FMI) au Congo, Oscar Melhado, lors de la présentation du rapport de son institution sur les perspectives économiques de l'Afrique subsaharienne. Aussi a-t-il invité les autorités du pays à étudier des mécanismes permettant de maintenir ces perspectives à moyen terme.

Plusieurs défis structurels restent encore à relever pour faire bénéficier la population congolaise des effets induits par cette croissance et lui garantir un mieux-être. Le pays, qui espère devenir à l'horizon 2025 un pays émergent, dispose de nombreux atouts pour y parvenir. Parmi ces défis, on note l'augmentation de la croissance potentielle, la création d'emplois par l'amélioration du climat des affaires et la lutte contre le chômage et la pauvreté. 

En effet, malgré la reprise économique, le taux de chômage ne semble pas reculer et se situe à 34,2% selon les dernières données fournies par l'Office national de l'emploi et de la main-d'œuvre (Onemo). « La hausse du chômage est causée par plusieurs facteurs au nombre desquels une activité limitée du secteur privé, une économie peu diversifiée (dépendant essentiellement du pétrole), une disparité entre les compétences exigées par les employeurs et celles présentées par les demandeurs d'emploi et un environnement réglementaire et institutionnel défavorable », a souligné la représentation de la Banque mondiale au Congo.

En dépit d'une décélération de l'inflation qui continue d'être contenue dans la limite communautaire maximale à 3% et à 0,2% au Congo, expliquait le ministre des Finances lors du dernier comité monétaire national, la cherté de la vie inquiète les populations aux revenus faibles et moyens : augmentation des prix dans divers secteurs, notamment l'habitat, l'alimentation, la santé.
 
« La variation des prix des denrées alimentaires sur le marché s'explique par le fait que le Congo ne produit pas assez et reste soumis à la loi de l'offre et de la demande », a déclaré le directeur départemental de la Répression des fraudes au ministère du Commerce, Basile Obongui. Les pouvoirs publics peinent encore à stabiliser les prix des denrées, malgré les mesures annoncées, parmi lesquelles la distribution des balances et l'affichage des mercuriales dans les marchés en vue d'uniformiser les prix. Dans les grands centres urbains, par exemple, le prix des logements modernes de deux pièces est passé de 35 000 FCFA en 2009 à près de 60 000 FCFA aujourd'hui, en raison du coût des matières premières (ciment, planches, fer, etc.). 

Au plan de l'alimentation, les projets agricoles mis en place par le gouvernement sont encore loin de produire leurs effets sur le marché. Ainsi, le sac de foufou (farine de manioc) vendu jadis à 18 000 FCFA coûte actuellement 40 000 FCFA. La production locale de viande satisfait à peine 25% des besoins alimentaires dans un pays qui compte 70 000 têtes de bovins et 180 000 d'ovins et caprins. Malgré une production de 8 000 œufs par jour au village agricole de Nkouo, le prix de l'œuf n'a pu, comme prévu, baisser et demeure à 125 FCFA contre 50 FCFA au Cameroun, par exemple.
 
Dans le même registre, l'eau et l'électricité fournies par les sociétés nationales (SNE et SNDE) coûtent cher, alors que la qualité et la régularité laissent à désirer.

Les mesures pour une meilleure redistribution des richesses

Afin de corriger cette situation et de favoriser une meilleure redistribution des richesses, le gouvernement a pris une série de mesures visant à lutter contre la pauvreté et à renforcer le pouvoir d'achat des ménages.
La gratuité des droits scolaires et des soins de santé liés à la césarienne, au paludisme des femmes enceintes et des enfants âgés de zéro à quinze ans fait partie de ce train de mesures. Dans ce secteur, un ambitieux programme sera mis en place en 2012 que le gouvernement a déclaré Année de la santé. Il prévoit la réalisation d'infrastructures, la formation du personnel et l'implication des Congolais de la diaspora exerçant dans le secteur de la santé.
 
Parmi les mesures que la population a saluées comme positives, la suppression de certains frais relatifs à la délivrance des documents administratifs attend son application dans les faits. En matière d'emplois dont la fonction publique demeure le principal pourvoyeur, la configuration macroéconomique nationale a permis au gouvernement de prévoir, en 2012, un effort d'investissement supérieur à celui de 2011 d'environ 40%, soit 1 400 milliards FCFA contre 1 010 milliards en 2011 pour lutter contre le chômage.

Dans le cadre de l'exécution des engagements sociaux, le gouvernement a fait adopter par le Parlement la loi-cadre sur la sécurité sociale qui a vocation à étendre la couverture sociale à la majorité de la population.
Pays pétrolier, le Congo veut mettre un accent particulier sur la création de sociétés privées pour réduire le taux de chômage et diversifier son économie essentiellement fondée sur l'or noir qui contribue pour 85% au budget de l'État et à près de 90% des exportations. Pour ce faire, il est crucial que les initiatives menées par les autorités gouvernementales pour améliorer le climat des affaires se poursuivent, dans le cadre du programme de réformes visant à développer les infrastructures de base et à améliorer les systèmes douanier.
De même, il sera nécessaire d'harmoniser les positions des multiples ministères, donateurs et consultants impliqués afin de maintenir l'élan imprimé au programme des réformes.
 

Les défis de la diversification de l'économie congolaise

« La diversification du tissu économique congolais est le plus sûr moyen de préserver le rythme relativement élevé de la croissance économique nationale, de lutter contre la pauvreté par la création de milliers d'emplois décents et de réduire la forte dépendance de notre économie au pétrole », rapportait le ministre de la Communication dans le compte rendu du conseil des ministres du 24 juin 2011.

Cette diversification assise sur différents piliers figure aujourd'hui parmi les priorités du gouvernement qui s'active à créer les conditions de l'industrialisation du Congo. Pour parvenir à cet objectif, le gouvernement veut orienter davantage de ressources à l'investissement en accordant une place de choix à la construction des infrastructures de base. C'est dans cette optique qu'ont été réalisées la route Obouya-Boudji-Okoyo-frontière du Gabon (au nord) et la Nationale n°1, dont le premier tronçon reliant Pointe-Noire à Dolisie (160 km) a été inauguré le 22 décembre par le président de la République. 

Ces infrastructures, auxquelles s'ajoutent les deux principaux aéroports (Brazzaville et Pointe-Noire), aideront à améliorer les conditions de circulation des personnes et des biens au niveau national et faciliteront l'intégration sous-régionale de l'Afrique centrale.

« La RN1 est un espoir de plus pour la population qui dispose désormais d'une infrastructure essentielle et indispensable de lutte contre la pauvreté. Chacun suivant ses capacités et ambitions sera libre d'investir ce couloir pour mener des activités en vue du mieux-être individuel et collectif », a déclaré le ministre de l'Équipement et des Travaux publics, Émile Ouosso, à l'inauguration du tronçon Pointe-Noire/Dolisie.

Volet aussi important pour la diversification de l'économie, la mise en service d'infrastructures énergétiques, notamment le barrage d'Imboulou et la centrale à gaz de Pointe-Noire, permettra d'accélérer le processus d'industrialisation déjà perceptible dans certains secteurs, dont celui des mines.

Le secteur minier, longtemps resté dans une phase d'exploration, pourrait amorcer en 2012 la phase d'exploitation grâce au déploiement du réseau électrique dans les départements ciblés pour le développement des activités industrielles. L'exploration du fer réalisée dans le massif du Chaillu (au sud-ouest) et la Haute-Sangha (dans l'extrême nord-ouest) a abouti à des projets tels que celui de Zanaga avec le groupement Xstracta et Mining Project Developpment et de Mayoko avec la société DMC Iron.
 
À côté du secteur des mines, l'agriculture et les télécommunications sont également des maillons essentiels du processus de diversification et de développement économique du Congo.

S'agissant du premier, le gouvernement, en lançant en 2009 le processus de mécanisation de l'agriculture, se montre préoccupé de faire jouer à ce secteur un rôle de premier plan pour accroître les ressources hors pétrole tout en améliorant quantitativement et qualitativement la production agropastorale.

Quant aux télécommunications où la variété des opérateurs constitue déjà un atout au plan financier, la connexion attendue du pays au câble sous-marin devrait permettre le doublement des performances.
 
Par ailleurs, s'impose également la nécessité d'accorder un intérêt particulier au secteur des petites et moyennes entreprises qui souffre d'un manque d'appui pour son éclosion.

                                              Par Jrang An@go.

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